Cet immeuble, c’est la Casa Celestina, le nom qui lui ont donné ses cinq locataires.
Voici la Reine d’abord, au dernier étage, plus près des étoiles, le seul endroit supportable pour une ancienne étoile dont le corps ne s’envole plus depuis trente ans, et les pieds qui faisaient de si jolies pointes s’enracinent ; la Reine, qui ne vivait que des amours d’une nuit, une seule représentation parce que les répétions lassent, amoureuse transi d’un Fabio qu’elle tient à distance depuis qu’elle ne vole plus.
Voici Rosalie, commerciale d’agence de publicité, inséparable de François, directeur artistique, à tel point qu’on les appelait « FrançoisetRosalie », mais voilà, François est parti un beau matin, en allant chercher des allumettes, comme dans la chanson.
Voici Simone, enfance vosgienne, des envies d’espace, qui part parcourir le monde et tombe sur un gaucho en Argentine, coup de foudre, toundra, tourbières, tango et un petit Diego beau comme un Jésus, mais le gaucho est trompeur et s’acoquine d’une jeune anglaise.
Voici Giuseppina, petite sicilienne, surveillée par ses frères velus comme le lait sur le feu, empêchée d’amour et de grand air, mariée à Luigi, vilain comme une melanzana et qui préfère le foot à la tendresse, même la nuit de sa nuit de noce.
Les voilà toutes réunies depuis des années dans cet immeuble où, à part un étrange Jean-Pierre, aucun homme n’est autorisé à pénétrer.
Et puis voici Juliette, qui vient occuper l’appartement de Carla (partie chercher en Inde ce qui remplace les hommes) ; Juliette, jeune monteuse de cinéma, qui connaît les scènes d’amour par cœur et qui rêve d’en être l’héroïne un jour, et qui va remuer toutes ces femmes qui y ont renoncé.
Sous couvert de comédie, L’immeuble des femmes qui ont renoncé aux hommes*, est une très élégante réflexion sur l’amour, le désir, et surtout la façon de les faire vivre longtemps. Il y a du Barbara Constantine chez Karine Lambert, cet art de griffer avec une plume. Pas étonnant qu’un bouche à oreille enthousiaste ait déjà séduit 65.000 lectrices. Et un lecteur 🙂
*L’immeuble des femmes qui ont renoncé aux hommes, de Karine Lambert. Éditions Le Livre de Poche depuis le 10 juin 2015. Prix Saga Café 2014 –Meilleur premier roman belge.