Les mots des chanteurs qu’on a aimés, les années passées à grandir, le rire des enfants, l’autre qu’on adorait, la sœur partie à vingt-six ans trois mois et six jours, qu’on ne peut oublier et dont l’impossibilité de l’oubli fait mal et consume encore et toujours ; va, tout s’en va, la douleur qu’on emporte avec soi, le temps assassin, les idéaux, les promesses de ceux qui devaient changer le monde, les paroles des autres, les rêves socialistes, les chansons, les drapeaux et les chanteurs ; va, tout s’en va, le bébé de six jours qui ne reste pas ici et rejoint les étoiles, la tante morte, les 33 tours, la gauche, le chanteur qui a grossi et embrasse maintenant les flics, les illusions, les désillusions aussi, l’amour de la vie, les grandes espérances, l’âme même des grands chagrins Place de la République, Bruno Carette, les fulgurances, l’amour ; va, tout s’en va, ne reste que Michel Drucker.
Mistral perdu ou Les évènements* est un livre formidablement désenchanté, le survol de nos vies, de ce qu’elles furent, avant de finir comme des feuilles d’automne, des papiers froissés, qui s’envolent, retombent et se laissent emporter par l’eau des larmes, d’un ruisseau, d’un caniveau.
Nous sommes peu de choses, mais si belles pourtant.
*Rentrée littéraire 2017. Mistral perdu ou Les évènements, de Isabelle Monnin. Éditions Lattès. En librairie depuis le 6 septembre 2017.