Puisque l’on s’interroge beaucoup sur le genre en ce moment, on pourrait tout à fait s’interroger sur le genre de Elle Neige, le troisième roman de Marine Kergadallan — ex-publicitaire à qui l’on doit, entre autres, les drôlatiques petites blagues sur les emballages des produits Monoprix. En effet, Elle Neige sonne comme « Quelle heure est-elle » ? Comme « Elle pleut », mais surtout, à l’instant même où l’on se hasarde à suivre les traces du peintre Lucien Bell, héros du livre qui tient contre lui un livre qui parle d’une certaine Yvonne, on découvre des chapitres comme des chapitres de roman, d’autres comme de la poésie, d’autres encore comme des hoquets de cœurs, bouquets de mots, haïkus, vers libres, brefs dialogues, pétales de voyelles, cailloux de consonnes ; bref, milles autres genres que le seul roman, et c’est là l’incroyable talent de Marine : nous conter son histoire d’amour et de froid, son histoire d’abîme, de livre dans le livre et de personnage dans le personnage en utilisant toutes les palettes de mots, comme Lucien Bell les couleurs avec ses huiles. Elle Neige n’est pas un roman. Iel est bien plus grand que cela. Iel est un livre d’amour des livres. Du désir. Et de la beauté.
*Elle Neige, de Marine Kergadallan, aux éditions Diabase. En librairie depuis le 26 octobre 2021.