Un été rue des Saints-Pères (8/9). Chalumeau. Je me souviens de ce mot parce qu’il y avait une blague mnémotechnique à l’école qui disait qu’un chalumeau, c’était un dromaludaire à deux bosses, ainsi, lorsqu’on nous demandait combien de bosses avait un chameau, on répondait sans erreur. Bref, tout ça pour dire que Vice*, le nouveau roman de Laurent Chalumeau est avant tout une affaire de langage.
Au-delà du sujet — la femme séparée de l’Attorney General du Grand État du Nouveau-Mexique s’en donne à cœur, mais surtout à corps joie de sa liberté sexuelle retrouvée ; tombe sur tout un tas de gaillards, du doux au bad boy qui adore filmer ses fellations dans le désert, en passant par un adepte des Incels, à savoir Involuntary celibates, sorte de tarés qui se vengent des femmes qui se refusent à eux, en gros en les torturant, tessons de bouteilles et autres délicatesses en tous genres — au-delà du sujet donc, qui nous rappelle que la liberté des femmes (le fameux Vice du titre) n’est pas encore une chose qui va de soi chez pas mal de mecs, épatant sujet au demeurant, traité de façon sulfureuse par Chalumeau, cette lecture a surtout été une balade dans une langue pour moi nouvelle. Je ne sais pas à quel style littéraire se relie ce livre. Gonzo ? Foutraque ? Western ? Djeun ? Provoc ? LSD ? Et si je me suis parfois senti, à la lecture de certains passages, « Lost in translation », comme disait Sofia Coppola, c’est cela aussi la grâce d’un livre.
Être jeté dans ses vides.
*Vice, de Laurent Chalumeau. Aux éditions Grasset, sises rue des Saints-Pères à Paris. En librairie depuis le 12 mai 2021.