Ses deux premiers romans* étaient pour moi de magnifiques héritiers de ces textes et films noirs des années 50, certes remis au goût du jour, mais qui possèdent assidûment cette particularité de croire au bien et au mal en tant qu’ils sont les deux seuls éléments sérieux capables de définir un personnage. Ainsi fabrique-t-on les héros.
Rebelotte avec Est-ce ainsi que les hommes jugent ?** qui aurait pu porter le titre d’un film d’Hitchcock, Le faux coupable, ou de Fritz Lang, Chasse à l’homme : l’histoire de Gustavo Santini, accusé de tentative d’enlèvement sur une petite fille de treize ans et d’homicide sur la personne du père de la petite fille.
Mathieu Menegaux, avec la rouerie d’un grand scénariste, nous entraîne dans cette broyeuse policière qui débarque toujours à l’aube, à l’heure des réveils, des petits déjeuners en famille, juste avant l’école, avant le boulot. Il nous jette malicieusement dans cet enfer, là où tout ce qu’on dit peut être retenu contre nous, et nous y maintient en apnée jusqu’à l’inculpation de Gustavo. Ou non.
Mais c’est après que les choses deviennent vraiment terrifiantes.
Quand la meute décide de fabriquer un criminel, quand elle s’affranchit de la justice des hommes pour imposer celle de la rumeur.
Et qu’elle devient à son tour criminelle.
*Je me suis tue (2015) et Un fils parfait (2017), chez Grasset.
**Est-ce ainsi que les hommes jugent ?, de Mathieu Menegaux. Éditions Grasset. En librairie depuis le 2 mai 2018.
(Le titre de cette chronique est emprunté à Gérard Manset).