Je me souviens de l’incroyable audace des films américains des années 70. Un après-midi de chien. L’épouvantail. Point limite zéro. Taxi Driver. Dès les premières images, on savait. On devinait la tragédie. On pressentait l’impasse. On attendait la chute et c’était sa trajectoire qui nous fascinait, nous hypnotisait. Il n’y avait pas d’happy end, de rose bonbon, pas davantage de chansonnette ; juste cette brutalité, cette férocité qui parfois change notre regard sur le monde, sur les gens, qui en affaiblit certains, en renforce d’autres. Eh bien le nouveau roman* de Nicolas Delesalle fait partie de cette famille-là, de ces textes, comme ces scénarios, qui osent aller au bout des choses, au bout du chaos, de la faute à pas de chance, de cette fatalité tant redoutée (et qui fait de nous des petits voyeurs heureux) : Nous ne sommes pas faits pour durer et à l’échelle géologique, sept ans, dix-huit ans ou soixante-dix ans, c’est du pareil au même (page 194).
Voici donc quatre gaillards à bord d’une Suzuki Vitara sur la piste de Mendoza (Argentine) quand survient le drame. La tôle qui se froisse. Les corps qui se disloquent ; les souvenirs, les espoirs aussi. Et nous révèle toute notre inutile beauté. Chapeau, l’ami !
*Mille Soleils, de Nicolas Delesalle. Éditions Préludes. En librairie depuis le 10 janvier 2018.