Même si j’avais souvent vu son nom d’alors, Lorette Nobécourt, sur plusieurs ouvrages publiés chez Grasset, je n’avais jamais rien lu de Laurence Nobécourt. Ceci dit, on ne peut pas tout lire.
Et voici qu’on m’a offert Le chagrin des origines* — bienveillant présent subséquent, je suppose, à la parution de mon Enfant réparé, car tous deux traitent de l’écriture en tant qu’elle peut, ainsi que le prétend le bandeau de celui-ci : « Sauver la vie ».
Je ne sais pas si écrire sauve la vie ; certainement aide-t-elle à survivre.
Le livre de Laurence est dense, singulier, truffé de citations dont bon nombre d’elle-même, divisé en courts chapitres autour d’un mot ou d’un sentiment, tous reliés entre eux par son besoin d’écriture depuis son plus jeune âge, une écriture comme une armoire d’abord, dans laquelle se réfugier, puis un miroir, puis un mouroir, puis enfin une lumière afin, justement, de sauver sa vie. Car Laurence, apprend-t-on, a souffert d’un terrible eczéma pendant plus de quarante ans, a été diagnostiquée bipolaire, s’est adonnée, écrit-elle, à la boisson, a « haï, aimé, trahi, méprisé, détruit, volé, abusé, jugé, éconduit « (page 200), avant de trouver dans l’écriture et la Foi la force de rester en vie.
Elle cite alors souvent les Écritures et je la comprends.
C’est un livre bouleversant mais qui, paradoxalement, ne m’a pas bouleversé — sans doute parce que je n’ai pas eu peur pour elle, pas eu froid pour elle, pas pleuré pour moi. Si ces livres de l’intime ne me tisonnent pas le ventre, je leur en veux un peu. La faute à mon cœur d’artichaut sans doute.
Pourtant, je vous incite à le lire car il est une merveilleuse plongée dans la nécessité de l’écriture, qui n’a rien à voir, écrit-elle, avec celle d’un livre publié ; mais surtout car il contient cette formidable phrase que lui lâche sa mère, page 165 : « Tes livres m’ont blessée, mais je te remercie de les avoir écrits ».
Et ça, ça m’a bouleversé.
*Le chagrin des origines, de Laurence Nobécourt, aux éditions Albin Michel. En librairie depuis le 4 septembre 2019.
PS 1. Son atelier d’écriture dont on me dit le plus grand bien : http://laurencenobecourt.com/?page_id=2977
PS 2. Page 206, Laurence publie ce texte de Charlotte Delbo, publié 25 ans après être revenue des camps. Pour ça, merci.