Les chiffres m’ont toujours donné le tournis (en cela, ils ressemblent aux mots). Voici Skidamarink, le 1er roman de Guillaume Musso, sorti en 2001, vendu à 3000 exemplaires et, si beaucoup aujourd’hui seraient aux anges d’y parvenir, on considéra alors ce score comme un échec. Depuis, 17 romans. On va dire plus ou moins 500.000 exemplaires à chaque fois. Et le double pour les Poche. Depuis 10 ans, Guillaume est l’auteur le plus lu en France (on l’aurait été une heure qu’on serait déjà bien heureux) et c’est mérité car comme le clamait une célèbre publicité pour le ketchup Heinz : « 500 millions de frites ne peuvent pas avoir tort ».
Et le voilà qui, pour fêter cet extraordinaire dixième anniversaire consécutif, nous offre la réédition de ce premier roman ébouriffant (qu’on ne dénichait jusqu’ici sur le Net qu’au prix filou de 250 ou 300 euros).
Voici que quatre individus qui ne se connaissent pas reçoivent chacun un morceau de la Joconde, au dos de laquelle figure une citation différente ainsi qu’un mot les enjoignant à se retrouver dans une église en Toscane. Alors, comme dans la plus grande tradition des romans à énigme, et quelques années avant le Da Vinci Code, Guillaume nous entraîne dans un thriller brillant qui mêle politique, eugénisme, serial killer et amour. Un premier roman à faire pâlir beaucoup de premiers romans tant il est construit, maîtrisé et dévoile déjà tout le talent à venir de ce conteur hors pair. Mais ce qui reste le plus touchant pour moi, c’est la passion qu’a ce petit gars de 26 ans (le fac-similé à la fin du bouquin d’un article de Nice Matin en 2001 nous montre son si jeune visage d’alors) : sa passion de l’écriture. On sent qu’elle est son sang. Et quand on voit combien de cœurs elle a irrigué, on se dit que la naissance d’un écrivain possède quelque chose de magique. Skidamarink est cette naissance-là.
*Skidamarink, de Guillaume Musso. Éditions Anne Carrière (2001), 250 à 300 € sur le Net. Éditions Calmann-Lévy (2020). 19€90 dans toutes les librairies.