Un garçon d’une quinzaine d’année voit un jour une jeune fille du même âge se baigner. Les tissus mouillés collent à la peau de la nageuse, épousent les formes inconnues et troublantes, voilà notre gaillard profondément émoustillé et, ce qui est du désir bien compréhensible, prend alors chez lui pour nom l’amour — ce qui, convenons-en, n’a pas grand-chose à voir.
Ceci dit, comme chacun sait, l’amour est incandescent ; il brûle ; d’où le titre de ce dixième livre** de Léonor de Récondo.
La jeune fille, aidée de la sœur du garçon, parvient à le retrouver en cachette. Ils s’aiment enfin, leurs peaux frissonnent, « et lui, fou de joie, incrédule, s’abandonne, largue les amarres, tout entier dans le corps d’Ilaria, son amour » (page 178).
Mais l’amour est trop fort, « cet amour réciproque l’effraie ; une peur sourde » (page 186), alors le jeune homme décide de s’enfuir.
Sur le bateau qui l’emporte, il contracte une méchante fièvre et meurt.
Quand elle apprend la funeste nouvelle, la jeune Ilaria met le feu à ses cheveux et les flammes lèchent, dévorent et consument « l’ardeur de son âme et le ciel de son corps » (page 221). Voilà.
Si ce n’était un texte de Récondo, si l’historiette ne se passait pas à Venise en 1699, si Ilaria n’était pas une des élèves de Vivaldi et son violon un chant d’amour, on pourrait croire à une romance d’ado.
C’est toute la fragile différence entre la littérature et le rien.
* Le titre de cette chronique vient d’une chanson de Marie Laforêt.
**Le grand feu, de Léonor de Récondo, aux éditions Grasset. En librairie depuis le 16 août 2023.