Voici un texte étonnant. Une femme (âgée sans doute) se démaquille devant son miroir. Les doigts ourlés de coton effacent les couches de mascara, de fond de teint, les couches du temps, révèlent un visage différent. Dévoilent d’autres époques où le corps s’envole, s’enroule autour d’un arbre, se « schluffen » dans les bras d’un homme ou dans la douceur turquoise d’une piscine. Le corps n’a pas, n’a plus d’âge, ce n’est pas important. Il est vieux parfois. Parfois il a quatre ans. Il file à l’arrière d’une mob. Il est immobile derrière une vitre, les yeux regardent la neige. Il croise un coréen qui fait une dissertation. On ne sait pas. Ce n’est pas important. Ah si. Il ne s’aime pas. C’est un texte impressionniste. Cubiste. Des chapitres posés là, au hasard des souvenirs, des angulosités d’une maladie qui n’est pas nommée, d’une enfance perdue dans une autre langue. La belle écriture de Fabienne est l’eau de toute cette mélancolie.
Editions Gallimard. Sortie le jeudi 28 août 2014.