J’ai rencontré R.J (pour Roger Jon) à l’aéroport de Genève où nous nous rendions au Livre sur les Quais, à Morges. Garçon doux, discret, petite barbe de la couleur d’une bonne George Killian’s, le voisin parfait en somme, à qui l’on confierait volontiers les clés de sa voiture, un crayon, un couteau de cuisine. Le problème, c’est ce qu’il en fait. Avec Les Assassins*, il signe l’un des plus beaux thrillers sur les grands assassins américains, une course-poursuite dans les scènes de crimes terrifiantes, une balade au pays des cerveaux malades, des marteaux qui écrabouillent les visages angéliques, des calibres .35 qui déciment une famille, papa, maman, les quatre enfants. On pensera bien sûr, au hasard de certains chapitres, au glacial De Sang Froid** de Capote. R.J a écrit avec une élégante efficacité cinq cents pages ébouriffantes, et portraituré quelques personnages finalement extrêmement émouvants, coincés qu’ils sont entre l’écœurement de ce dont ils sont témoins et l’impuissance à remettre le monde sur les rails –méchant cocktail qui les prive de cette petite chose à laquelle on rêve tous. Une vie. Vous savez, ce truc qu’on traverse avec quelqu’un qu’on aime, quelques amis, et où la couleur rouge n’évoque pas du sang mais les lèvres d’une femme qui vous envoie un baiser. Bref, un Toulon-Paris à trois cents à l’heure. (Allez, je referme le Kindle). Bon début d’année.
*Les Assassins, R.J.Ellory. Éditions Sonatine. En librairie depuis août 2015.
**De Sang Froid, Truman Capote. Éditions Folio.