C’est d’abord l’écriture qui frappe. Mais qui frappe. Comme on prend des baffes. Ou des gnons. Du coup, on est limite dans les pommes. Alors on se laisse aller. Comme une feuille au fil de l’eau d’une écriture. On suit l’histoire de cette famille de doux-dingues, mais sans les guimauves d’un Capra ou le bastringue d’un Bourdeaut. On assiste à l’histoire d’amour incendiaire des parents de la narratrice. Leur sexualité. Leurs besoins. Leurs faims. Des mots qui cognent, ceux-là. Coups indélébiles. Et puis la mort. Bien sûr. La mort trop tôt du père brillant. Du père amoureux. Inaccessible. Et puis la chute. Le deuil. Interminable. L’inconsolabilité. La dépression. La mort dont on voudrait qu’elle s’empare de soi, comme un gel. La folie qui pointe. Et la résurrection. Plus violente que la rédemption. Plus implacable aussi. Avec l’intime et flamboyant Saturne, Sarah Chiche raconte ses enfers (qui rime avec père) et nous prouve, une fois encore, que l’écriture, lorsqu’elle possède une telle force, a réellement un pouvoir de sorcier. Bon Noël à tous.
*Saturne, de Sarah Chiche. Édition du Seuil. En librairie depuis le 20 août 2020. A été sélectionné pour les Prix Goncourt, Femina, Médicis et Académie Française. Pas rien, tout ça.