Voici la véritable histoire d’Héloïse et Abélard*, sous le règne de Louis VI, dit Le Gros (1081-1137), narrée par le plus gouleyant, le plus truculent, le plus ouillu de nos raconteurs : Jean Teulé. Si on sait tous qu’une formidable passion charnelle incendiât le début de la relation entre le dialecticien redoutable et la nièce du chanoine Fulbert (avant de s’achever en mysticisme niais), jamais un auteur n’y avait posé les mots crus et gourmands de la chair. Dieu s’est introduit dans mes génitoires (page 39). Peu à peu, le cul rougit en d’autres endroits (page 45). Ils sont doux tes cheveux, mon amour. On dirait les poils de ton cul (page 65). Fous t’en trois. T’es une pute. Allez ramone (page 106). Etc. Teulé ressuscite San Antonio, Rabelais, et Robert de Blois, pour écrire ce récit jubilatoire qui éclaire ce que l’Histoire avait maintenu à l’ombre des robes et autres sombres soutanes. Enfin, à ceux et celles qui me demanderaient pourquoi son livre est sur des carottes, je les renverrais à cette douce promesse de la jeune Héloïse : Omnia tu mihi facis tibi facio, autrement dit : Tout ce que tu me fais je te le fais. Voilà comment la carotte (sauvage, blanchâtre et à peau coriace dans le livre) se retrouva dans le « gouffre » d’Abélard, pour son plus grand plaisir, semble-t-il.
*Héloïse, ouille ! de Jean Teulé. Éditions Julliard. En librairie depuis le 5 mars 2015.