Il y a un côté Beaujolais Nouveau chez Amélie Nothomb (bien qu’elle préfère, et de loin, les nectars champenois). Chaque rentrée nous offre sa nouvelle cuvée et je confesse y avoir irrégulièrement goûté ces derniers vingt-cinq ans – son premier cru remonte à 1992 et son surprenant Hygiène de l’assassin –, attiré par des tanins plus puissants. La perspective de revoir Amélie au Salon du livre de Québec, et d’y débattre avec elle, m’a donné envie de savourer son dernier livre, Riquet à la houppe, une nouvelle version du conte de ce bien pervers Charles Perrault.
Évidemment, ce n’est pas du côté de l’histoire qu’il faut attendre une surprise, on la connaît depuis l’enfance l’histoire : il est vilain mais intelligent, elle est jolie mais bête, et ils vont s’aimer (la perversion perraultienne), mais dans l’écriture nothombienne qui papillonne comme des enfants dans un jardin, et se délecte de nous faire une bonne farce.
Et surtout, c’est dans l’épilogue que se trouve la vraie malice du propos, lorsqu’Amélie confesse avoir lu La Comédie humaine de Balzac en entier, 147 ouvrages, et y analyse le rapport littérature/histoires d’amour : six pour cent des histoires d’amour balzaciennes se terminent bien. Seulement. Chouette. Car il n’y a rien de plus désespérant parfois que cette phrase : Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants.
*Riquet à la houppe, d’Amélie Nothomb. Éditions Albin Michel. En librairie depuis le 16 août 2016.