Rentrée littéraire 2016. « J’ai souvent pensé que ma capacité à souffrir, écrit Nina Bouraoui (page 244*), était égale à ma capacité à aimer ».
Voici donc un livre – un chant plutôt, un chant magnifique, de souffrance et d’amour, un chant aux paroles délicates, ciselées par la douleur lentement apprivoisée d’être quittée (mais y parvient-on jamais ?), une mélopée aux mots doux, épineux parfois, qui incisent l’immense chagrin de n’être plus aimée.
Un texte où l’immobilité nous oblige à plonger, en confiance, comme dans les profondeurs sombres de l’eau d’un lac.
Beaux Rivages, vous l’aurez deviné, est l’histoire d’une rupture – « un roman de résistance » comme le précise l’auteur –, balisée par les attentats de janvier et de novembre 2015 ; l’histoire d’un amour qui s’achève, et s’échoue sur les effrayants rivages de la folie des hommes, « nous étions tous visés » (page 240) ; le chant du cygne d’une femme qui aime encore celui qui ne l’aime plus, et dont la souffrance même possède l’éclat de l’amour, ses terribles envols, et sa beauté grave. « (…) il est aussi souffrance de ne plus souffrir » (page 207).
Nina Bouraoui entre dans cette nouvelle Rentrée littéraire avec un roman délicat, précis, envoûtant, sur ces si beaux rivages où se fracassent ces cœurs qui, aux aubes, sur le sable humide encore, ressemblent alors aux petits corps morts de ces oiseaux qui devaient voler sans s’arrêter, à l’instar des frégates.
*Beaux Rivages, de Nina Bouraoui. Éditions Lattès. En librairie le 24 août 2016.