Il y a fort longtemps, lorsque la télévision n’avait que deux chaines, il y avait un grand film le dimanche en début d’après-midi, sur l’une, puis au milieu de l’après-midi, sur l’autre. J’avais une dizaine d’années, je découvrais Gérard Philipe dans Le Rouge et le noir, La chartreuse de Parme, Fanfan la Tulipe, Jean Marais dans Le Masque de Fer, Le Bossu, Bobby Hyatt dans Les Aventure d’Hucklerry Finn. Je restais scotché devant l’écran en noir et blanc, je voyageais sans bouger, je m’évadais de tout, du retour au pensionnat le dimanche soir, des devoirs à rendre le lundi, des humiliations à venir au basket, j’étais emporté. C’est ce sentiment que je viens de revivre, quarante ans plus tard, à la lecture de La Scribe* d’Antonio Garrido – l’épopée d’une femme inoubliable dans la Franconie, à la veille du sacre de Charlemagne, en 799. Garrido a consacré sept ans de sa vie à ce livre. A l’arrivée, six cent trente pages haletantes autour du parchemin de la Donation de Constantin (qui devait assurer la pérennité de la chrétienté), d’aventures, de trahisons, de rebondissements, et d’amours venimeuses comme on les aime. Les soirées d’hiver sont longues, ça tombe bien.
*La Scribe, d’Antonio Garrido. Éditions du Livre de Poche. En librairie.